mercredi 30 novembre 2011

Tokyo Story, des histoires japonaises, collectif



Au salon du livre de Colmar, le 26 novembre dernier, je suis tombée par hasard, au gré des stands des éditeurs et associations, sur une bande dessinée que j'avais repérée sur le blog de Frédéric Vervisch, mon cousin : Tokyo Story. C'est d'ailleurs lui qui a fait l'illustration de la couverture.
Ni une, ni deux, j'ai décidé rapidement de l'acheter, après avoir discuté un petit moment avec les responsables de l'association Fugue en bulles et je ne regrette pas mon achat.
Il est ici question, comme son nom l'indique, du Japon, bien sûr. Sous forme d'histoires courtes, les auteurs évoquent là un aspect du Japon, vu d'Europe.

La première histoire, Hibakusha, raconte en quelques pages le devenir imaginaire des survivants de la bombe atomique du 9 août 1945 à Nagasaki. L'histoire est construite sur trois double-pages et une page simple. Le dessin est beau, doux, en noir sur fond ocre, et dévoile au fil des pages l'horreur de la mort, le fond s'assombrissant petit à petit comme un ciel d'orage... c'est saisissant.

La seconde histoire, Vague à l'âme, raconte, avec un graphisme fouillé et assez sombre, bien qu'en couleurs, la vie au travail d'un homme de Tokyo. De facture plus classique que la première, avec des cases et des bulles, l'histoire se déroule simplement, jusqu'à la chute finale, dévastatrice, que rien ne laissait présager...

Tokyo X Story est la moins sombre des histoires de Tokyo Story. Là encore, un aspect de la culture japonaise est mis en avant, et il s'agit là des geisha. L'histoire pourrait se passer n'importe où. Le héros est un grand admirateur du Japon, pratique les arts martiaux, et demande à sa petite amie de jouer à la geisha pour lui. La chute est drôle, et l'histoire est vraiment de très bon goût, j'ai été étonnée : je m'attendais à tout autre chose ! C'est une très bonne surprise. Le dessin de celle-ci est aussi le plus doux de toutes ces petites histoires, sans céder à un réalisme à tout crin.

Hikikomori te salutant !, l'histoire suivante, m'a posé plus de difficultés. J'ai dû la relire pour la comprendre. Je ne suis pas une grande connaisseuse des jeux vidéos en ligne, et c'est sans doute pour cela que j'ai eu du mal à comprendre. Cette histoire est en effet une immersion dans la tête d'un jeune joueur en ligne, avec ses rêves, ses fantasmes, sa solitude... là encore, la chute est brutale, assez inattendue, mais elle symbolise bien le contraste entre cette vie virtuelle et la réalité simple de la vie quotidienne, avec l'inadaptation qui peut résulter d'une trop grande addiction aux jeux vidéo... Fin tragique, mais qui semble être plus fréquente qu'on ne le pense. Graphiquement, le dessin est sombre, épuré, dans des couleurs sombres et assez uniformes restituant l'ambiance glauque du jour ou de la nuit de jeu, d'isolement... c'est très suggestif en tout cas, et d'une grande maîtrise, très abouti.

Golgoth 666 est le récit écrit par mon cousin et illustré par son frère. Il y a là deux références au Japon : le titre est un clin d’œil à la série Goldorak (que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, mais qui a marqué tous les trentenaires, dont, comme mes cousins, je fais partie), et les Yakusa, la mafia japonaise. Si j'ai été un poil déçue par l'histoire, j'ai en revanche été subjuguée par le dessin. Tout est en noir et blanc uniquement. Pas de gris, pas d'entre-deux. Du noir et du blanc, des traits blancs sur fond noir pour suggérer les motifs de la couverture, une silhouette blanche sur fond noir ou des pieds noirs sur fond blanc pour que les éléments se distinguent bien les uns des autres : c'est tout simplement superbe. L'histoire, c'est celle d'une vengeance, à la hauteur du préjudice subi par la petite Ikuko... Assez improbable, et c'est bien cet aspect-là qui m'a gênée. A part cet aspect, l'histoire est bien menée, originale, et on y retrouve d'une certaine façon tout le rêve d'enfant, sa toute-puissance supposée aussi, la frontière très ténue entre le rêve et la réalité... La fin est grandiose, bien qu'extrêmement violente (j'ai du mal, beaucoup de mal avec la dernière case...).

Enfin, Promotion japonaise raconte l'histoire d'un homme qui travaille pour une grande firme japonaise. Il a gravi les échelons et attend sa prochaine affectation. Il est ici question, comme dans la seconde histoire, du rapport des Japonais avec le travail. Jusqu'où le dévouement du travailleur peut-il aller ? Quelle est la place de l'individu, de ses désirs, de sa vie personnelle, familiale ? Ce sont ces questions que pose cette histoire, et mon seul regret, c'est que la fin ne soit pas suffisamment claire. Quelle a été la décision de cet homme ? En quelques pages, on s'attache à lui, à sa jeune épouse qui va accoucher dans les jours qui viennent, et j'ai été presque frustrée de ne pas savoir quelle avait été sa décision, en définitive...

Globalement, ce recueil est une très très bonne surprise, même si je ne l'aurais peut-être pas acheté si mes cousins n'y avaient pas écrit. Je ne regrette rien : cette bande dessinée vaut vraiment le détour !

Paru aux éditions Fugue en bulles, 2011. ISBN : 978-2-919633-03-6. 10€


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